IL Y A CENT ANS

L'activité municipale en 1895

Voici d'abord la liste des douze conseillers (élus en 1892): Germain Ancey; Félicien Berguerand (ancien maire, démissionnaire en 1893, et non décédé comme je l'avais supposé, à tort, dans le n° 7 d'E v'lya, p. 7); Jean-Baptiste, Joseph et Maurice Bozon; Jean-Louis Burnet; Elie, Philippe (adjoint depuis 1893) et Pierre-Joseph Claret; Pierre Charlet; Michel Dunand (maire depuis 1893); Félix Semblanet. Le secrétariat est dévolu à Félix Semblanet ou, plus rarement, à Elie Claret. La présence des conseillers est très inégale. Félicien Berguerand (pris par ses activités à Chamonix, où il tient l'hôtel Royal) n'est jamais présent.

Le conseil a tenu ses quatre sessions statutaires et quatre séances extraordinaires. La réunion a toujours lieu le dimanche "à une heure du soir". Le conseil se réunit dans la salle de classe du chef-lieu.

La gestion financière de la commune occupe abondamment les conseillers. On veille avec la plus grande attention à limiter les dépenses. On n'accepte le changement du statut des routes et chemins préconisé par le préfet qu'à la condition que la dépense d'entretien qui incombe à la commune ne sera pas augmentée. En sens inverse, le conseil accroît les ressources, non seulement par une légère progression d'impôt, mais aussi par la vente de biens communaux (notamment des arbres achetés pour réparations urgentes par les consorts de Balme) ou par la mise en adjudication des équipements touristiques. Ainsi, après avoir attribué "le pavillon de Bérard" à Gustave Pache avec la stricte obligation qu'il l'exploite "lui-même ou par les siens", le conseil se réunit en séance extraordinaire lorsqu'il est informé que le sieur Emile Giroud de Martigny offre de sous-louer avec un supplément de 10 %. La transaction est acceptée "puisqu'il y a avantage pour la commune", l'adjudicataire se portant garant du locataire.

Fait plus notable: deux ans seulement après que le P.L.M. s'est engagé dans la construction de la ligne Le Fayet-Chamonix-Vallorcine (voir E v'lya n° 3, p. 14), la compagnie ferroviaire demande à la commune de lui vendre deux terrains en rives droite et gauche du torrent de Bérard en vue de la construction d'un barrage. La municipalité consent, à la condition de garder l'usage des bois qui poussent sur ces parcelles. Mais le projet semble avoir été abandonné.

Cette rigueur financière n'empêche pas le conseil de décider les dépenses courantes (chauffage des trois écoles, réparation des ponts du chemin "conduisant au Buet"), ou exceptionnelles comme la réfection des ponts emportés par l'Eau noire en novembre.

La préoccupation la plus notable de cette année 1895 est déjà celle du tourisme. Le conseil se soucie de relancer l'activité du Balcon de la cascade de Barberine dont la location avait été abandonnée "faute d'amodiateur" (sic). On note que le site "paraît vouloir reprendre de l'importance." Sa location "pourrait devenir une nouvelle source de revenus pour la commune." Le conseil, qui prévoit une visite annuelle de l'état des installations, mettra en adjudication la plate-forme pour un bail de six ans. Il fournira le bois de mélèze nécessaire à la réfection éventuelle des supports, le reste de la réparation et l'entretien étant à la charge du seul adjudicataire, qui devra par ailleurs trouver "bonne et valable caution qui s'engagera solidairement avec lui."

Les conseillers paraissent soucieux de gérer au mieux leurs ressources présentes tout en préparant l'avenir touristique. Les activités agricoles et artisanales ne sont pas directement mentionnées, mais les douze conseillers (même ceux qui ont par ailleurs un commerce) figurent sur la liste des élus de 1892 à titre d'agriculteurs.

Michel Ancey