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La crémation, pain béni pour les marchands de mort

 


Certes, la photo n'est pas encore en place, mais il faudra pourtant la crediter comme suit (Photo Untel).

Le sol marbré, les sièges en rotin et la décoration contemporaine ne sont pas celle d'un spa. Pas de bain à tourbillon derrière les grandes portes coulissantes en face de l'accueil, mais la salle de cérémonie d'un crématorium francilien. Dans cet établissement ouvert depuis 2001, l'architecture a été pensée pour que les familles se croisent mais ne se rencontrent pas. Ouverte sur une baie vitrée qui laisse deviner un bassin entouré de bambous, la salle de cérémonie jouxte celle des appareils de crémation. « Toute la décoration a été refaite afin que les familles se sentent un peu comme à la maison. Nous, nous ne sommes pas en deuil. Nous accompagnons », souligne Olivier (*), un directeur adjoint. Le cadre, dont l'entreprise flirte avec un chiffre d'affaires en millions d'euros, vient de planter le décor : la mort est rentable et la crémation tend à prendre une part très importante du business funéraire dont le chiffre d'affaire annuel est évalué, en France, à trois milliards d'euros (répartis entre 5.000 entreprises et 14.000 points de vente). C'est près d'un tiers du budget consacré par la France à l'écologie, l'aménagement et le développement durable en 2008. Rien d'alarmant, si ce n'est le risque potentiel, encouru par tous les Français, d'être victime de marchands de mort pressés d'ajouter quelques zéros au devis d'obsèques par manque d'éthique commerciale.

L'urne trop petite, il propose le sac plastique

Dominique, 50 ans, garde un souvenir pénible de la crémation de sa grand-mère. Les flammes, le bruit de l'appareil et l'urne brûlante. « Il y a eu un problème, raconte aussi une autre personne confrontée à cette pratique funéraire il y a peu, dans les Charentes. L'urne ne pouvait contenir toutes les cendres. Le maître de cérémonie a alors demandé s'il pouvait les mettre dans un sac plastique. » Ce témoignage jure avec l'image de professionnels entretenue par les crématoriums. « Nous nous devons d'offrir un service de qualité », explique Philippe Le Normand, directeur général du crématorium d'Evry-Courcouronnes (Essonne). « De toute façon, nous avons une délégation de service public et nous ne sommes que locataires des municipalités. » Ce matin-là, une famille est attendue dans le crématorium au savoir-faire plutôt traditionnel et qui a 5.335 crémations à son actif. « Il faut du coeur et du respect pour faire ce travail », commente Claude Charlemagne, maître de cérémonie, alors qu'il prépare le recueillement, teste la musique, installe le portrait du défunt et relit les lettres des familles. « Si elles ont des difficultés à parler, je prends le relais. » Philippe Le Normand souligne aussi la présence d'un vidéo projecteur. Un pupitre fait face à une cinquantaine de chaises. Des écorces d'arbres fossilisées sont accrochées aux murs bleus. L'ambiance est solennelle. La présence de la mort est perceptible. « Si la famille le souhaite, elle peut assister au départ, précise Philippe Le Normand, en ouvrant les portes qui conduisent aux appareils de crémation. Derrière une vitre, ils pourront voir le cercueil, poussé en vingt secondes par un bras hydraulique. Elle pourra, si elle le souhaite, recevoir l'urne 90 minutes plus tard. Plus de soixante d'entre elles sont encore stockées, pleines et en attentes de leurs propriétaires. « Nous conseillons d'utiliser une urne caveau, poursuit Philippe Le Normand, parce que c'est important qu'il y ait un endroit pour se recueillir. Un jour, nous avons retrouvé une famille dans le jardin du souvenir, une cuillère à la main, en train de ramasser les cendres qu'elles avaient dispersées. Nous existons depuis 20 ans : chez nous, c'est l'expérience qui parle », conclut-il.

Le recueillement, dernier hommage essentiel

Dans le crématorium d'Olivier, ancien des Pompes funèbres générales (PFG), il n'y a pas d'urnes funéraires à l'entrée ni de corbillard d'époque. Les costumes du personnel sont sobres et bien coupés. La cérémonie dure trente minutes ici aussi. La musique est préparée ou personnalisée. « Pourquoi uniquement du classique ? On peut aussi bien choisir de très belles chansons d'Elvis Presley. Il faut que le recueillement soit à l'image de la personne », lance le directeur adjoint pour qui « les religions ne représentent rien ». « Nous préférons le départ symbolique, précise-t-il encore. Nous sortons le cercueil de la salle de cérémonie par une grande porte sur le côté et c'est fini. La famille ne voit pas la suite. Elle revient chercher l'urne dans la demi-journée qui suit. » L'une d'elles vient de quitter le crématorium. Le maître de cérémonie coupe la stéréo, passe un coup de balai et se dirige dans la salle des appareils de crémation. Une odeur de fleurs et le silence habillent l'opération de chargement du cercueil sur le chariot. « Nous insistons pour qu'il y ait un geste humain qui le pousse dans l'appareil de crémation », commente Olivier. En quelques secondes les portes s'ouvrent, la boîte scellée disparaît... et puis plus rien. Ou peut-être un peu de poésie. Dans le parc, à l'arrière du bâtiment, les arbres et les rosiers sont devenus les dernières demeures des personnes « crématisées ». Ce jardin du souvenir sera plein d'ici trois ou quatre ans. « Pour rien au monde je ne changerai de travail, affirme Olivier qui possède le niveau d'habilitation de conseiller funéraire, parce que chaque famille est unique et qu'il y a une réelle approche psychologique. »

 

Le marché des obsèques ne connaît pas la crise

Huit à dix crémations sont réalisées du lundi au samedi dans ce crématorium parisien. La mort est bien synonyme de bénéfices. Olivier parle facilement de cette personne âgée qui a déboursé 7.000 euros pour réserver un cave urne et des investissements conséquents réalisés dans l'entreprise.

Avec une perspective d'au moins 700.000 décès par an en France d'ici vingt ans (soit 150.000 de plus qu'aujourd'hui), le marché des obsèques n'est pas près de connaître la crise. La crémation, reconnue par l'Eglise en 1963, et aujourd'hui choisie par un tiers des défunts ou leurs familles, non plus. Depuis trois décennies, le nombre de crématoriums a d'ailleurs été multiplié par 15 (passant de 10 en 1980 à 146 en 2010). Vers 2040, une personne sur deux devrait utiliser la crémation.

« Le métier n'a pas été très clair pendant des années. Mais c'est un secret de polichinelle. » Aussitôt l'aveu formulé, à Olivier d'assurer : « Mais ce n'est plus le cas. Et puis s'il y avait des ententes entre fleuristes, pompes funèbres et marbriers, ce n'était pas plus cher pour la famille. Au contraire, les prix étaient cassés. » Qu'en pense Michel Kawnik, président fondateur de l'Association française d'information funéraire (Afif) ? Très sereinement, assis dans son canapé mais pesant chacun de ses mots, il explique : « Le funéraire ça n'est pas Mère Thérésa. La loi Sueur de 1993 a mis fin au monopole communal, aux ententes dans ce secteur et l'a ouvert à la concurrence. » L'article 4 du décret paru en mai 1995 stipule par exemple qu'« avant toute opération funéraire, un devis écrit, gratuit, détaillé et chiffré (?) pour chaque prestation ou fourniture, la nature et le prix TTC ainsi que le montant total du devis TTC » doit être remis. « Mais chassez le naturel, il revient au galop », commente Michel Kawnik. Il y a eu de grosses dérives dans les années 1997-1998. » « Escroquerie aux contrats d'obsèques : 12 millions d'euros détournés » : la République du Centre, entre autres, s'est fait l'écho, en août 2009, de pratiques douteuses dans le secteur du funéraire. A la permanence de l'association, les coups de téléphones se succèdent. Michel Kawnik répond aux familles endeuillées, depuis 1992. « Ca m'a coûté deux mariages », lance-t-il. Et d'ajouter, plus sérieusement : « Pour la crémation, il existe des cercueils spéciaux, vulgairement appelés en carton, et qui sont agréés. Ils coûtent entre 300 et 350 euros alors qu'un cercueil en bois est aux alentours de 650 euros. Les pompes funèbres ne le proposent jamais. C'est d'ailleurs une attitude qui va à l'encontre des considérations écologiques. » Les cercueils en bois contiennent du vernis, de la colle, du métal. Une nouvelle loi devrait obliger les crématoriums à s'équiper d'un filtre dans les années à venir, afin de contenir le mercure et autres métaux lourds présents dans les corps. « Un investissement d'environ 600.000 euros » selon Olivier, qui va induire « une augmentation du prix de la crémation. » « Avec le filtre, elle coûterait deux euros de plus », rétorque Michel Kawnik, pour un investissement des crématoriums « de l'ordre de 100 à 150.000 euros ». Qui croire ? « Concurrence malsaine, manque de transparence, d'information, de professionnalisme, maintien des familles dans une position d'otages, frais non obligatoires », etc. Le président de l'Afif admet son regard très critique et justifie son action par un exemple concret : « Les obsèques avec crémation reviennent à 1.600 euros dans le Nord, plus de 2.000 euros à Paris et près de 3.000 euros à Nice. » Si la préfecture de police de Paris recense près de 200 entreprises agrées dans le secteur funéraire, elle ne détient pas de liste noire de mauvais professionnels mais admet avoir récemment fermé une de ces sociétés qui exerçait illégalement, sans plus de précisions.

Après avoir passé la porte de plusieurs entreprises de pompes funèbres, constat est fait que ce monde du funéraire est aussi impénétrable et silencieux que la mort. Toutes les demandes sont possibles mais les offres les plus intéressantes sont souvent à la deuxième page du catalogue. Celle que l'on ne montre pas. Aux familles d'être attentives. Michel Kawnik conseille toujours d'établir quatre ou cinq devis. Il met en garde : « Le rôle des pompes funèbres, c'est de vendre. Pas de dire aux familles que tel ou tel service est futile ou trop cher. »

Lilian Maurin et Marine Guillaume

(*) Le prénom a été changé.

     

11

C'est en millions de tonnes la part de lithium disponible sur la planète.

 

1000

Le nombre de femmes que Sébastien Night, prof de drague, a abordées en un an.