Quelles destinations pour les animaux saisis ?
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Il n'est pas toujours facile de trouver
une terre d'accueil aux animaux saisis et plus particulièrement
aux fauves et autres singes magots (Photo Fondation Brigitte Bardot).
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Saisir des animaux vivants transportés illégalement n'est déjà pas
chose aisée. Leur trouver un nouveau foyer est un autre casse-tête.
Alors ces animaux ont-ils tous droit à une nouvelle vie après la saisie
?
Claude Batout, seul douanier français spécialisé dans le
contrôle des espèces protégées par les conventions
internationales, le concède volontiers : « Mon plus gros problème
est de trouver un point de chute aux animaux que je saisis ». Les
tonnes de coraux qu'il a pu confisquer pendant ses neuf années de
service sont allées enrichir les collections des aquariums de
Paris Cinéaqua et du Sea Life de Paris -- Val d'Europe. Mais
aujourd'hui, les deux structures n'ont plus de places. Le
douanier Batout ne peut donc plus saisir de coraux vivants sans
les condamner à une mort certaine.
Pour les reptiles, le problème est moindre. Les bêtes sont
dispatchées en priorité dans des zoos et des parcs animaliers
comme la ménagerie du jardin des plantes qui récupère
régulièrement des tortues aquatiques et terrestres. Rudy
Wedlarski, l'un des trois vétérinaires de la ménagerie
parisienne, raconte que « deux caméléons ont fait leur entrée à la
ménagerie après que des fleuristes les aient découverts en
déballant leurs commandes de fleurs exotiques ». Le périmètre
restreint des jardins zoologiques n'offre toutefois pas la
possibilité d'accueillir tous les spécimens récupérés par les
douanes ou par l'Office National de la Chasse et de la Faune
Sauvage (ONCFS). En septembre dernier, une impressionnante saisie
de 188 Uromastyx Geyri, lézards jaunes ou rouges du Niger, a
été mise en pension à la Ferme Tropicale, magasin parisien
spécialisé dans la vente de reptiles et choisi pour sa grande
capacité de stockage. Faire appel aux détaillants animaliers est
néanmoins une solution de dernier recours pour Claude Batout qui
n'a « pas envie de créer de conflits entre les animaleries ».
Aujourd'hui, les lézards sont toujours gardés dans la succursale
de l'enseigne du XIIIe arrondissement jusqu'à ce que la justice
décide de leur sort. Une situation pas forcément évidente pour
Teddy Moncuit, le directeur d'exploitation de la Ferme Tropicale
: « Nous ne recevons aucune aide financière pour maintenir en vie
ces animaux. Nous ne pouvons pas les vendre jusqu'à ce que le
verdict du jugement, qui peut prendre plusieurs années, soit
prononcé. 188 lézards, ça prend de la place ».
Si les quantités
saisies sont réduites, Claude Batout et ses collègues peuvent se
tourner vers des personnes titulaires d'un certificat de capacité qui
indique qu'ils ont les connaissances et les installations nécessaires
pour élever des reptiles dans de bonnes conditions.
Les espèces protégées récupérées par les douanes ne sont pas toutes assurées de leur survie
Les oiseaux sont plus difficiles à placer. Quand aux fauves,
ça vire au casse-tête. En 2007, les douanes de Montpellier ont pu
transférer deux lionceaux, saisis à bord d'un véhicule de
tourisme, au zoo de Marseille. Mais il arrive souvent que l'on ne
trouve pas de terre d'accueil aux animaux confisqués. Au nom de
la priorité sanitaire et en l'absence de zone de quarantaine, les
bêtes concernées sont alors euthanasiées. Ce genre de cas arrive
notamment lors de la saisie d'animaux détenus illégalement dans
des cirques, les zoos ne voulant pas récupérer ces bêtes par peur
des représailles. Les fondations Brigitte Bardot et 30 millions
d'amis entrent alors en action pour tenter de sauver l'animal et
le confier à un refuge où il pourra couler des jours heureux.
Les espèces protégées récupérées par les douanes ou les agents
de l'ONCFS ne sont donc pas toutes assurées de leur survie. Une
situation « scandaleuse » pour Allain Bougrain-Dubourg, président
de la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO), qui travaille
actuellement avec Claude Batout sur un projet de zone de
quarantaine au sein du domaine de l'ancienne chasse
présidentielle. Pour que la France rattrape son retard par
rapport à ses voisins européens. Pour que l'on n'arrache plus un
animal des griffes des trafiquants pour l'envoyer à une mort
certaine.
Fabien Madigou
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